Sybille Troubleyn est Wine Lady of the Year

05 avril, 2017

  « Nous donnons aux jeunes femmes trop peu d’occasions de grandir dans le métier. »  

 

« Quand on s’y connaît mieux, on boit moins mais mieux »

 

Sybille Troubleyn est Wine Lady of the Year

 

La nouvelle Wine Lady Sybille Troubleyn apprend au Belge à boire du vin. Avec WineWise, elle est la seule en Belgique à proposer les célèbres formations WSET (Wine & Spirit Education Trust). Ces diplômes sont LA référence des connaisseurs dans le monde.

 

Avant d’obtenir le diplôme WSET, Sybille Troubleyn avait déjà accumulé pas mal de connaissances en matière de vin. Sa passion pour le vin est née à l’école hôtelière Spermalie à Bruges. Elle s’est ensuite perfectionnée à Bordeaux. Pendant un an ou deux, elle a voyagé, sac sur le dos, à la découverte des vignobles du nouveau monde, expérience qui a débouché sur l’écriture d’un livre. Elle a travaillé chez Sopexa, Vinopress et Syntra, puis a fondé sa propre école du vin, WineWise, qu’elle dirige aujourd’hui avec son partenaire Piet Vannieuwenhuyse.

 

Vous attendiez-vous à décrocher le titre ?

« J’ai été plutôt surprise, puisque c’est un prix du public et que je ne suis pas active sur les réseaux sociaux. Je suis très fière de mon titre et j’espère que l’amateur de vin trouvera ainsi encore plus facilement le chemin de nos formations. Une meilleure connaissance du vin débouche sur une offre plus qualitative, dans le commerce et au restaurant. C’est aussi un honneur de marcher ainsi sur les traces de celle qui a décroché le titre avant moi, Virginie Saverys. »

 

Dans le monde du vin, les femmes méritent bien un peu plus d’attention.

« En Belgique effectivement, mais dans le reste du monde les femmes sont très bien représentées dans le monde du vin. Dans la plupart des pays, la proportion hommes/femmes est de fifty fifty. »

 

Comment expliquez-vous ce retard ?

« Il tient à mon avis aux femmes elles-mêmes. Je n’ai pas le sentiment que les occasions offertes aux femmes soient moins nombreuses. Personnellement, je ne l’ai pas ressenti en tout cas. J’ai vu passer beaucoup de jeunes filles prometteuses qui ont ensuite été reléguées dans l’ombre. Parfois, c’est dommage qu’elles soient tout de suite mises sur un piédestal. Si elles ne répondent pas tout à fait aux attentes, elles disparaissent alors dans le néant. Les hommes peuvent se faire une place au soleil plus progressivement. Nous donnons aux jeunes femmes trop peu d’occasions de grandir dans le métier. Lorsque j’ai fait mes études à Bordeaux, il n’y avait pas encore beaucoup de femmes qui suivaient les cours. J’étais une sorte de cobaye, leur première étudiante internationale. »

 

Pourquoi, après vos études, avez-vous quitté un pays vinicole comme la France pour revenir en Belgique ?

« Pour pouvoir faire mes études, j’ai fait un emprunt en Belgique. Il me semblait logique de venir travailler en Belgique pour rembourser mon emprunt. »

 

Outre les formations WSET, que fait encore WineWise ?

« WineWise dispense aussi des formations en entreprise, basées sur le programme d’études de WSET, mais à la mesure de l’entreprise en question. Nous travaillons avec leurs vins, nous voyons quels sont les besoins du personnel, nous donnons des formations continuées…  Nous avons 16 chargés de cours dans différentes régions. »

 

Quelles sont les aptitudes que doit avoir un bon sommelier ou une bonne Wine Lady ?

« Avant tout de la persévérance, surtout si vous vous installez à votre compte. Ensuite il faut avoir une vision personnelle. Ce n’est pas la voie la plus facile à suivre, mais c’est la plus honnête. Il faut être très curieux, car dans le domaine des wine & spirits, on n’a jamais fini d’apprendre. On découvre sans cesse de nouvelles choses et on rencontre de nouvelles personnes qui peuvent avoir une vision très différente de la nôtre. C’est ce qui rend les choses si passionnantes ! »

 

La dégustation, ça s’apprend ?

« Oui, toute personne qui a l’envie et la curiosité peut apprendre la dégustation. Bien sûr, certains maîtriseront la chose plus vite que d’autres. Une connaissance préalable des saveurs et des parfums est un atout. Il faut apprendre aux enfants dès leur plus jeune âge à humer, à sentir le parfum des choses. Impossible de nommer une chose que l’on n’a jamais goûtée ou sentie. Beaucoup de gens n’arrivent pas à faire la distinction entre acides et sucres par exemple.

 

Vous laissez-vous encore facilement prendre à contre-pied ?

« Oui, et c’est heureux. Nous ne restons pas accrochés aux millésimes. Il n’y a rien de plus agréable que de se mettre à chercher ce qu’il y a dans le verre et d’assembler les pièces du puzzle. »

 

Apprend-on à mieux savourer le vin quand on le connaît mieux ?

« Absolument. Fort de sa connaissance, un caviste ou un sommelier peut aussi mieux conseiller les gens qui ont un plus petit budget. Quand on s’y connaît mieux, on boit aussi moins mais mieux. »

 

Le vin est-il aussi important dans votre vie privée ?

« Le vin me donne toujours énormément de plaisir. Mais je n’en bois pas tous les jours. Je fais en revanche des dégustations au quotidien. »

 

Quelles sont les découvertes vos plus récentes ?

« Il y a énormément de choses qui bougent. Fini le temps où le savoir et le savoir-faire allaient dans une seule direction : de l’ancien vers le nouveau monde. Aujourd’hui, les pays vinicoles classiques ont eux aussi des choses à apprendre des vins du nouveau monde. Il y a là-bas vraiment un échange entre jeunes gens, ce qui est une très bonne chose. A l’avenir, nous allons voir arriver des bulles, et je ne parle pas seulement de champagne français. Certains pays affûtent leur savoir. On fait parfois preuve de condescendance vis-à-vis de l’Afrique du Sud, mais ce pays produit de grands vins. Chaque pays a son propre apport et ses propres mérites. Aujourd’hui, le boisé n’a plus la cote et l’on s’oriente vers des vins plus accessibles, qui mettent davantage l’accent sur le fruité. »

 

Voyez-vous un avenir pour les vins belges ?

« Cela reste un produit de niche, et les vins belges sont aussi relativement chers. De beaux vins continueront en tout cas d’être produits et j’observe une nette amélioration, mais en quantité de production nous ne faisons pas le poids face au reste du monde. Jamais je ne choisirai un vin belge par pur chauvinisme. La qualité doit être là, peu importe le pays. »

 

Y a-t-il encore trop de buveurs d’étiquette ?

« Malheureusement oui. Ce n’est pas pour rien que notre cours de base s’intitule ‘Looking behind the label’. »

 

Que pensez-vous du vin dans les restaurants ?

« Les cartes des vins ont évolué positivement par rapport à il y a une quinzaine d’années. Dans les meilleurs restaurants surtout, il y a une offre variée dans différentes catégories de prix. Dans les brasseries, il y a encore pas mal de choses à améliorer. Un cours comme WSET n’est jamais du temps perdu, c’est un investissement qui rapporte. Il vous donne davantage confiance en vous, de sorte que vous êtes plus à même de bien conseiller vos clients. »

Katia Belloy

www.winewise.be

 

Wine Lady of the Year, le pourquoi du comment

 

La Wine Lady of the Year est élue par les votes des internautes, à l’initiative de Foodprint, Meyhui et Winterhalter. Au total, nous avons reçu plus de 7000 votes.  Une élection à part, pour souligner l’importance des femmes dans le monde du vin, trop souvent occultée par l’ombre des hommes. Dans un monde où la masculinité est encore toujours le meilleur sésame vers le pouvoir et les responsabilités, la Wine Lady of the Year remet les pendules à l’heure. Parce que, pour citer Agnès Jaoui : « les filles, c’est pas noté pareil* ». Et qu’il est temps que ça change. www.sommelieroftheyear.be/Vote/WineLadyOfTheYear

 

*Réplique, en français dans le texte, du film de Cédric Klapisch, écrit par Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri, ‘Un air de famille’.

 

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